Réformer, c'est permis ! | Permis de conduire
Le 6 mai dernier, François Hollande demandait au ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, de simplifier les procédures d’obtention du permis de conduire. Décryptage.
1) Des élèves perdus dans le monde opaque des auto-écoles
Le permis de conduire en théorie : code de la route et 20 heures de conduite
Pour passer son permis de conduire, la législation impose :
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de réussir l’épreuve théorique du permis de conduire, où code de la route ;
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de suivre une formation à la conduite d’au moins 20 heures ;
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de réussir l’épreuve pratique du permis de conduire.
Ainsi, la plupart des élèves estiment qu’ils pourront réussir le permis de conduire du premier coup, pour 1 000 €, et en trois mois.
Le permis de conduire en réalité : code de la route et entre 30 et 40 heures de conduite
La réalité est toute autre :
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dans la plupart des grandes villes de France, il faut entre 30 et 40 heures de conduite pour être prêt à passer l’examen pratique du permis de conduire ;
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de même, il faut entre six mois et un an pour être prêt à se présenter à l’examen pratique, et au moins trois mois pour se représenter en cas d’échec (avec des frais de présentation de 150 € en moyenne).
L’élève qui pensait dépenser 1 000 € et obtenir rapidement son permis de conduire se retrouve avec un permis de conduire un an plus tard, à 1 700 € en province ou 2 100 € à Paris.
2) Une réforme du permis de conduire attendue depuis un an
Le constat des associations Prévention routière et CLCV : l’opacité conduit au mauvais choix
En août dernier, l’association Consommation, logement et cadre de vie (CLCV) dénonçait le manque de transparence des auto-écoles :
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des prix variant du simple au double selon les villes (par exemple, de 780 € à Lille à 1 425 € à Paris pour le forfait 20 heures), voir les quartiers ;
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des taux de réussite très inégaux d’une auto-école à l’autre, inconnus des élèves (nous calculons une moyenne de 43% à Paris contre 52% à Marseille).
Ce constat suivait de peu celui de l’association Prévention routière :
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le permis de conduire coûte largement plus cher que prévu ;
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les élèves choisissent rarement le bon forfait en se limitant à 20 heures ;
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les élèves négligent les avantages de la conduite accompagnée et supervisée
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dont le coût final est largement plus faible à 1 100 € en moyenne (pas besoin d’heures hors-forfait) ,
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et dont le taux de réussite est beaucoup plus élevé, compte-tenu de l’expérience acquise par l’élève en conduisant avec un accompagnateur.
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Les pistes de réforme du permis de conduire évoquées par la Sécurité routière
Nous avons déjà analysé les premières pistes de réforme du permis de conduire évoquées par le ministère de l’Intérieur :
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augmenter le nombre d’inspecteurs pour réduire les délais de passage de l’examen pratique ;
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diminuer l’âge minimum de la conduite accompagnée à 15 ans pour encourager l’expérience.
La Sécurité routière évoque désormais la possibilité d’évaluer les auto-écoles en leur demandant de publier leurs taux de réussite pour que l’élève puisse évaluer la qualité de la formation proposée. Sans surprise, les auto-écoles n’y sont pas favorables.
Du reste, malgré un travail qui dure depuis septembre dernier, les résultats des mesures d’urgence décidées en janvier et des propositions globales de réforme du permis de conduire se font attendre, alors même que de nombreux élèves espèrent passer leur permis pendant l’été.
3) Des solutions pourtant simples pour réformer le permis de conduire
Plus de transparence pour plus de concurrence entre auto-écoles
L’ensemble des auto-écoles n’a pas besoin d’être réformé ; il convient simplement de permettre aux bonnes auto-écoles de sortir du lot. D’ailleurs, c’est l’objectif de Quelpermis et des autres comparateurs d’auto-écoles.
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Le coût de la formation : Ce n’est pas le prix du forfait 20 heures qui compte mais bien le prix d’une formation de 30 à 40 heures. Ainsi, si une auto-école facture 1 000 € son forfait 20 heures et 50 € l’heure de conduite hors-forfait, elle devrait également publier, à titre d'information, le coût estimé d’une formation, à savoir entre 1 500 € et 2 000 €.
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Le taux de réussite : C’est le taux de réussite par rapport au nombre d’élèves présentés, et pas le taux de réussite seul, qui mesure la qualité d’une formation en auto-école. Ainsi, une auto-école avec un taux de réussite de 80% qui n’a présenté que 10 élèves pourra être comparée à une auto-école avec 60% de taux de réussite qui en a présenté 200.
Réformer l’apprentissage du code de la route par une formation en préfecture
Les préfectures pourraient se charger de la préparation à l’examen théorique du permis de conduire :
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Les logiciels de révision en ligne produisent d’excellents résultats et permettent aux élèves de réviser à leur rythme. Pourquoi ne pas renforcer la concurrence entre ces formations pratiques ? Impossible pour l’Etat de favoriser un opérateur en particulier, mais l’élève pourrait choisir l’offre qui lui convient le mieux.
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Ces logiciels pourraient être accessibles sur le site Internet des préfectures, qui demanderaient des frais de présentation payables lors de l’inscription. En cas d’échec, l’élève n’aurait plus la surprise des frais de représentation que demandent les auto-écoles.
Imposer une véritable évaluation initiale aux auto-écoles en début de formation
Les auto-écoles doivent déjà évaluer le niveau des candidats pour leur proposer une formation avec un nombre d’heures de conduite en adéquation avec leurs besoins et leur niveau. Or, souvent, cette évaluation initiale correspond en fait à la première heure de conduite, le forfait se limite à 20 heures, et l’élève se retrouve obligé de prendre de nombreuses heures hors-forfait imprévues.
Le Gouvernement pourrait renforcer la distinction entre l’évaluation initiale et la première heure de conduite, et inciter les auto-écoles à proposer un nombre d’heures réaliste à leurs élèves. Ce n’est pas une tâche facile : le prix augmente rapidement avec les heures supplémentaires. D’où l’importance de bien informer l’élève sur le coût probable d’une formation au permis de conduire.
Dissocier la formation à la conduite et la présentation à l’examen pratique
A l’heure actuelle, c’est aux auto-écoles que sont attribuées les places d’examen en fonction de leurs taux de réussite, à l’exception des élèves inscrits en candidat libre.
S’il revenait à l’élève de s’inscrire (en ligne ?) en préfecture à l’examen pratique en payant des frais d’inscription uniques :
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les préfectures pourraient mieux prévoir le nombre d’inspecteurs nécessaire à la masse de candidats du département, tout en se finançant directement ;
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il n’y aurait pas de différence de prix d’une auto-école à l’autre pour se présenter à l’examen pratique du permis de conduire ;
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les délais de présentation et de représentation à l’examen du permis de conduire seraient les mêmes pour tous les candidats, quelle que soit leur auto-école ;
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les auto-écoles seraient évaluées par les élèves uniquement pour la formation à la conduite, qui reste leur coeur de métier ;
- si les élèves s’inscrivaient en mentionnant leur auto-école, l’évaluation de la formation à travers le taux de réussite demeurerait pertinent.